Vagineering : une contraception non hormonale de la flore vaginale
Une jeune équipe d’étudiants chercheurs montpelliérains tente de développer une contraception locale vaginale non hormonale. Explications.
Une contraception innovante à base de probiotiques :
Comment cette contraception fonctionnerait ? L’équipe d’étudiants âgés de 20 à 25 ans et réalisant leurs travaux au sein du laboratoire UM-CNRS-Inserm, l’explique en ces termes sur sa page d’appel aux dons Ulule :
“Nous souhaitons [comprendre et définir en détails les différentes composantes génétiques de] Lactobacillus jensenii, une bactérie non pathogène habitant la flore vaginale [puis] insérer un “cocktail” de gènes dans L. jensenii pour lui faire produire plusieurs molécules d’intérêt inhibant la motilité des spermatozoïdes, empêchant ainsi toute fécondation non voulue.
Cette production serait régulée par des “gènes interrupteurs” qui permettraient de permuter du mode “ON” qui correspond à la production des molécules contraceptives, au mode “OFF” qui correspond à la répression totale de la production.”
Interviewée par Cheek Magazine, Tamara Yehouessi, membre de l’équipe de recherche qui a développé Vagineering l’explique en des termes plus simples :
“L’objectif est de créer une contraception non hormonale en modifiant génétiquement les bactéries qui se trouvent naturellement dans le vagin. À la base, ce qu’on voulait, c’était étudier la flore vaginale car elle est très peu connue. On a fini par isoler l’une des bactéries qui constitue cette flore, nommée Lactobacillus jensenii. L’idée est de la designer génétiquement pour qu’elle produise des spermicides. On mettrait ensuite ces bactéries dans nos vagins pour que, lors d’un rapport sexuel, il ne puisse pas y avoir de fécondation.”
Autrement dit, nous avons dans nos vagins une bactérie nommée Lactobacillus jensenii, qui est parmi les plus présentes dans la flore vaginale. Parmi ses propriétés, cette bactérie peut ralentir voire inhiber totalement la progression des spermatozoïdes. Mais à l’état naturel cette propriété n’est pas suffisante pour empêcher les spermatozoides de passer. L’idée serait donc de modifier génétiquement des Lactobacillus jensenii pour booster leur propriété spermicide, de les insérer dans des suppositoires à insérer dans le vagin plusieurs fois par mois ou avant chaque rapport afin de créer un spermicide efficace.
L’idée serait donc de modifier génétiquement des Lactobacillus jensenii pour booster leur propriéte spermicide, de les insérer dans des suppositoires à insérer dans le vagin plusieurs fois par mois ou avant chaque rapport afin de créer un spermicide efficace.
Pourquoi le choix du terme “Vagineering” ? Vagineering est l’association des mots “vagin” et “engineering” (ingénierie).
Trouver des réponses aux effets secondaires et aux pollutions engendrées par les hormones contraceptives :
Pourquoi avoir eu l’idée de développer une telle contraception ? Les jeunes étudiants expliquent :
“L’idée est venue quand nous avons parlé entre nous des problèmes de natalité et de surpopulation dans les pays de développement. À cela s’ajoutent les problèmes environnementaux et de consommation d’hormones chez les femmes”
— Tamara Yehouessi, membre de l’équipe de recherche qui a développé Vagineering.
“Quand on a eu l’idée, on s’est demandé à qui ça allait servir. Dans notre groupe d’amies, on est de plus en plus nombreuses à penser que c’est galère de prendre la pilule, pour plusieurs raisons. Déjà parce que ça ne convient pas à tout le monde. Il y a souvent des effets secondaires, que ce soit des douleurs, une prise de poids, de l’acné, etc. D’autres n’arrivent simplement pas à prendre un comprimé tous les jours à heure fixe. Il y a aussi le problème de la pollution induite par les hormones. On les jette dans les toilettes, ça va dans les océans, les poissons les mangent et nous, on mange les poissons.”
— Source : Cheek Magazine, “Vagineering : ils veulent faire d’une bactérie un moyen de contraception non hormonale“).
Médaille d’or et prix spécial au concours international de biologie synthétique de Boston :
Fin octobre 2018, l’équipe de 9 étudiants montpelliérains est revenue du concours international de biologie synthétique iGEM (International Genetically Engineered Machine) de Boston avec une médaille d’or et un prix spécial “Best education and public engagement” (NDLR : “Meilleure éducation et engagement du public”).
Il faudrait plusieurs années avant de pouvoir développer concrètement cette contraception puis la mettre sur le marché. Ainsi, il n’est pas exclu qu’une start-up prenne le relais si la suite des explorations scientifiques s’avèrent prometteuses.
Autres articles à lire à ce sujet :
- Cheek Magazine : “Vagineering : ils veulent faire d’une bactérie un moyen de contraception non hormonale“
- Blasting News : “France : Une piste de contraception non-hormonale explorée par 9 étudiants montpelliérains“
- France 3 / France Info TV : “Montpellier : 9 étudiants travaillent sur une bactérie révolutionnaire pour la contraception féminine“
- Madmoizelle : “Vagineering, pour qu’une bactérie devienne un moyen de contraception“
Pour en savoir plus sur la pilule, son impact sur la santé et l’environnement et les alternatives non hormonales déjà existantes, lisez J’arrête la pilule.